Droits de succession : qui paie quoi et comment ?

Les droits de succession constituent l'impôt direct dû par le ou les héritiers d'une personne décédée. Ils sont normalement acquittés lors du dépôt de la déclaration de succession. Il existe des modalités particulières de paiement et des cas d'exonération. Tour d’horizon en 10 points clés.

1/ Droits de succession : de quoi parle-t-on ?

Sauf cas d’exonération, les droits de succession sont calculés sur la part nette – valeurs des biens imposables diminuées des dettes déductibles – des biens transmis revenant à chaque héritier ou légataire, après application d'un ou plusieurs abattements, puis selon un tarif qui diffère en fonction du lien de parenté avec le défunt.

Bénéficiaire de la transmission et nature de l'abattement

Montant de l'abattement

Conjoint ou partenaire pacsé

Sans objet, car exonération totale

Abattement personnel

Enfants et ascendants

100 000 €

Frères et sœurs

15 932 €

Neveux et nièces

7 967 €

Abattement spécial en faveur des personnes handicapées

159 325 €

Abattement général en faveur des autres personnes

1 594 €

Barème des droits de succession

Succession entre époux et partenaires pacsés

Exonération

Transmission en ligne directe

Fraction de part nette imposable

Taux applicable

Jusqu'à 8 072 €

Entre 8 072 € et 12 109 €

Entre 12 109 € et 15 932 €

Entre 15 932 € et 552 324 €

Entre 552 324 € et 902 838 €

Entre 902 838 € et 1 805 677 €

Aude-là de 1 805 677 €

5 %

10 %

15 %

20 %

30 %

40 %

45 %

Transmission entre frères et sœurs

Fraction de part nette imposable

Taux applicable

Jusqu'à 24 430 €

Au-delà de 24 430 €

35 %

45 %

Autres transmissions

Parents jusqu'au 4e degré

55 %

Parents au-delà du 4e degré et non-parents

60 %

Les frais de notaire

Lorsque le notaire remplit la déclaration pour le compte des successeurs, il facture des émoluments qui s'ajoutent à ceux qui lui sont dus pour ses autres interventions – par exemple, procès-verbal d'ouverture d'un testament, acte de notoriété ou attestation de propriété immobilière – et aux droits et taxes perçus au profit de l'État lors de l'établissement de certains actes. L'ensemble constitue les frais de notaire proprement dits.

2/ Qui doit payer ?

Les héritiers, les donataires et/ou les légataires du défunt sont tenus au paiement des droits de succession.

Bon à savoir

L'héritier est celui qui recueille tout ou partie de la succession du défunt par la simple intervention de la loi. Le légataire est celui qui reçoit tout ou partie de la succession du défunt en vertu de dispositions prises par l'intermédiaire d'un testament. Le legs peut être universel (toute la succession), à titre universel (une quote-part de la succession) ou particulier (un ou plusieurs biens déterminés). Le donataire ici représente la personne gratifiée par une donation dont la réalisation est subordonnée au décès du donateur, comme par exemple une donation au dernier vivant (on parle aussi de donation "à cause de mort").

3/ Solidarité des héritiers pour le paiement des droits

Sauf d'en être exonérées, il revient aux personnes bénéficiaires de la succession de payer les droits de succession, calculés sur la part qui leur revient. Cependant, l'administration fiscale peut réclamer le paiement de la totalité des droits à l'un quelconque des cohéritiers, sans se préoccuper de se conformer aux conditions dans lesquelles les sommes dues sont finalement supportées par chacun d'entre eux.

Les légataires, universels ou à titre particulier, et les donataires ne sont pas solidairement tenus du paiement des droits de succession, ni entre eux ni avec les héritiers. Ainsi chaque légataire ou donataire est-il tenu au paiement des seuls droits afférents à son propre legs.

L'héritier qui accepte à concurrence de l'actif net est lui tenu solidairement au paiement des droits, comme l'héritier pur et simple.

4/ Quand les droits doivent-ils être payés ?

Les redevables sont tenus d'acquitter les droits lors du dépôt de la déclaration de succession. Rappelons, d'une part, que la déclaration n'est pas obligatoire pour les petites successions, à savoir celles dont l'actif brut est inférieur à 50 000 € pour les successions en ligne directe, entre époux ou entre partenaires de Pacs ; inférieur à 3 000 € dans les autres cas. D'autre part, l'intervention d'un notaire n'est pas obligatoire, a fortiori pour les successions simples et celles ne comportant pas de bien(s) immobilier(s). Si tel est le cas, il revient aux héritiers et aux légataires d’effectuer la déclaration de succession.

Les héritiers étant solidaires pour le paiement des droits, chacun d'eux a qualité pour souscrire la déclaration au nom de tous. Les légataires et donataires n'étant pas tenus par cette solidarité, chacun d'eux doit donc souscrire une déclaration. Les divers redevables peuvent néanmoins se réunir pour rédiger une déclaration unique portant sur l'intégralité de la succession et signée par chacun d'eux.

Le délai légal pour souscrire la déclaration de succession est de 6 mois lorsque le défunt est décédé en France métropolitaine. Le délai se compte de quantième à quantième et se calcule par mois. Le délai démarre le lendemain du jour du décès. Le dernier jour du délai est compris dans celui-ci. Si le dernier jour est un dimanche, un jour férié ou un jour de fermeture totale ou partielle du service des impôts, le délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable qui suit.

Point d'attention

Les héritiers et légataires doivent veiller au respect du délai de dépôt de la déclaration de succession, car même s'ils ont donné mandat à un notaire pour établir et déposer la déclaration de succession pour leur compte, ils restent débiteurs des intérêts et pénalités encourus en cas de retard. Il en va ainsi y compris lorsque le retard est dû à la négligence du notaire (par exemple, Cass. com. 29-6-1999 n° 97-11.676-D), les héritiers pouvant toutefois se retourner contre le notaire pour obtenir le remboursement des intérêts et pénalités acquittés. Pour les héritiers, l'existence d'un litige ayant pour objet la dévolution successorale ne fait pas non plus obstacle à leur obligation.

5/ Télédéclaration et règlement en ligne pour bientôt

Au plus tard le 1er juillet 2025, la déclaration de succession et le paiement des droits s'y rapportant devront être réalisés par voie dématérialisée.

6/ Pénalités en cas de déclaration tardive

Lorsque la déclaration de succession est déposée tardivement, les sanctions de droit commun sont applicables, sauf cas particuliers. Ainsi le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration est-il assorti de l'intérêt de retard et d'une majoration de 10 %. La majoration est portée à 40 % lorsqu'une mise en demeure est restée sans suite au terme d'un délai de 90 jours.

En principe, tout héritier apparent doit déclarer la succession dans le délai légal et ne peut différer le paiement des droits correspondants lorsque ceux-ci deviennent exigibles, même s'il n'a pas encore obtenu la délivrance de son legs ou si la dévolution héréditaire est contestée. Il peut néanmoins demander une restitution s'il y a lieu.

La situation du légataire doit cependant être distinguée de celle de l'héritier. En effet, en cas de contestation en justice portant sur un legs particulier, les droits de mutation correspondants ne sont exigibles qu'à compter de la date à laquelle une décision de justice a validé la libéralité litigieuse. De même, un légataire universel ne peut se voir infliger des pénalités pour défaut ou retard de souscription de la déclaration de succession dès lors que ses droits sont contestés. Le délai de 6 mois est opposable uniquement à compter de la décision de justice ayant définitivement reconnu ses droits.

7/ Quid en cas de décès de l'un des cohéritiers ?

Le décès de l'un des cohéritiers avant acquittement de l'impôt dû n'efface pas le caractère solidaire de la dette fiscale. Son ou ses héritiers deviennent alors débiteurs de la dette au même titre que le défunt.

Cependant, le décès du cohéritier modifie les effets de la solidarité pour ses héritiers. En vertu du principe de la division des dettes posé par l'article 1309 du Code civil, ils sont tenus au paiement de l'impôt dû par le défunt seulement au prorata de leurs droits respectifs dans sa succession.

8/ Paiement par remise de certains biens (dation)

Lorsque le montant des droits de succession est au moins égal à 10 000 €, tout héritier, donataire ou légataire, peut acquitter les droits dont il est redevable par la remise d'œuvres d'art, de livres, d'objets de collection, de documents de haute valeur artistique ou historique, de certains immeubles situés dans les zones du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, de bois et de forêts ou d'espaces naturels pouvant être incorporés au domaine forestier de l'État (CGI art. 1716 bis).

On retiendra principalement que, d'une part, les biens remis ainsi en paiement doivent être détenus en pleine propriété et depuis au moins 5 ans. Le délai de détention n'est pas requis si le ou les biens ont été acquis à titre gratuit (par voie de donation ou de succession). D'autre part, le paiement par dation implique un agrément préalable, délivré selon une procédure différente en fonction de la nature des biens offerts.

Bon à savoir

Les offres de dation portant sur des œuvres d'artistes vivants sont en principe exclues. Elles peuvent toutefois être acceptées sous réserve de l'authenticité de l'œuvre proposée, du niveau de notoriété internationale de l'artiste, de son niveau de reconnaissance sur le marché international de l'art et de sa cote, de la qualité artistique et/ou de l'importance historique de l'œuvre, de l'absence ou de la rareté d'œuvres équivalentes dans les collections nationales.

L'offre de dation, comprenant la description complète de l'objet donné (modèles de demande : ici (objet d'art ou de collection), ici (immeubles) ou ici (bois et forêts)), est déposée conjointement avec la déclaration fiscale à laquelle elle se rapporte.

Dès lors que l'Administration s'est prononcée, le paiement des droits est exigé dans un délai de 30 jours soit à l'issue du délai imparti au donateur (30 jours) pour accepter la valeur libératoire proposée par l'État, soit à compter de la date de réception de la décision du refus de l'offre de dation. Lorsque les délais ainsi prévus sont respectés, le contribuable n'encourt aucun intérêt de retard ou pénalité.

Bon à savoir

Lorsque la valeur libératoire retenue par l'État se trouve être inférieure à la valeur exprimée dans l'offre de dation, le redevable qui toutefois l'accepte est tenu au versement du complément de droits. À l’inverse, une valeur libératoire supérieure aux droits exigibles ne se traduit pas par le versement d'une soulte à la charge de l'État.

9/ Bénéficier de l'étalement du paiement des droits de succession

Les droits de succession font normalement l'objet d'un paiement comptant lors du dépôt de la déclaration. En cas de problème d'argent ou de montant conséquent à payer, l'Administration autorise toutefois un étalement du paiement des droits, moyennant intérêts. Dans tous les cas de figure, les droits ayant fait l'objet d'une autorisation de crédit pour leur paiement peuvent être acquittés par anticipation. 

Bon à savoir

L'Administration accepte les acomptes que versent les redevables sur le montant des droits. Ces sommes sont encaissées sans déclaration et ont pour effet, en général, de diminuer le montant de la pénalité qui frappe les déclarations tardives.

Deux systèmes permettent d'étaler le paiement des droits : le paiement fractionné et le paiement différé. Une formule mixte s'applique spécifiquement aux transmissions d'entreprises. Pour bénéficier de ce paiement à crédit, il faut le demander soit dans la déclaration de succession, soit séparément sur une simple lettre jointe à la déclaration. La demande doit contenir une offre de garanties suffisantes pour couvrir l'intégralité du montant à payer : une hypothèque sur un immeuble, une caution personnelle, le nantissement de titres, etc. L'administration a 4 mois pour accepter ou refuser la demande, le même délai étant accordé à l'héritier pour constituer des garanties.

Point d'attention

Les cohéritiers peuvent choisir des régimes de paiement différents. Cependant, du fait de la solidarité des héritiers pour le paiement des droits, le paiement différé ou fractionné sera accordé à ceux qui demandent un crédit seulement avec l'accord de ceux qui veulent payer comptant, ces derniers devant dès lors reconnaître avoir été informés qu'ils ne sont pas libérés par leur propre paiement et qu'ils restent tenus, le cas échéant, au paiement des sommes qui font l'objet du crédit.

Paiement fractionné

Le paiement fractionné consiste à payer les droits de succession en 3 versements égaux au maximum, à intervalles de 6 mois au plus et sur une période maximale d'un an en principe. Le premier versement est effectué avec le dépôt de la déclaration de succession.

Le nombre de versements est porté à 7 et le délai maximal est repoussé à 3 ans lorsque l'actif héréditaire comprend, à concurrence de 50 % au moins, des biens non liquides dont la liste est la suivante : brevets d'invention, clientèles, créances non exigibles au décès, droits d'auteur, fonds de commerce (y compris le matériel et les marchandises qui en dépendent), immeubles, matériel agricole, bestiaux et récoltes, offices ministériels, parts sociales dans des sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions, valeurs mobilières non cotées en bourse, objets d'antiquité, d'art ou de collection.

Paiement différé

Plusieurs situations permettent de déposer une demande de paiement différé. En premier lieu, celui-ci est accessible à l'héritier ou au légataire qui reçoit un ou des biens en nue-propriété. Dès lors, le différé de paiement est de 6 mois à compter de la réunion de l'usufruit à la nue-propriété ou de la cession totale ou partielle de cette dernière.

Le paiement différé peut aussi être demandé dans le cas d'une attribution préférentielle [ndlr : droit que la loi confère à une personne de se faire déclarer propriétaire exclusif d'un bien ou d'un ensemble de biens compris dans l'actif successoral] ou d'une réduction de libéralités consécutive à une attribution préférentielle. Le différé de paiement court jusqu'à l'expiration d'un délai de 6 mois à compter du terme du délai imparti à l'attributaire, au légataire ou au donataire pour le paiement des sommes dont il est débiteur envers ses cohéritiers.

Le paiement différé peut également être demandé dans le cas d'une succession pour laquelle le conjoint survivant a exercé l'option pour le droit viager d'occupation de la résidence principale (art. 764 du Code civil). La demande de crédit est limitée à la fraction des droits correspondant à la valeur imposable de l'immeuble grevé du droit viager d'habitation.

Cas des transmissions d'entreprises

Le paiement des droits de mutation sur les transmissions à titre gratuit d'entreprises (entreprises individuelles ou sociétés non cotées, sous diverses conditions) peut être différé pendant 5 ans à compter de la date d'exigibilité des droits et, à l'expiration de ce délai, fractionné sur une période de 10 ans (à raison de versements d'1/20e à intervalles de 6 mois).

Taux d'intérêt

Tant pour le paiement fractionné que pour le paiement différé, le crédit est octroyé moyennant le versement d'intérêts. Le taux de l'intérêt à retenir est celui applicable au jour de la demande de crédit. Il s'applique pendant toute la durée du crédit, quelles qu'en soient les variations postérieures.

Pour les demandes formulées en 2023, le taux de base est fixé à 1,7 %.

S'agissant des transmissions d'entreprises, le taux est réduit à 0,5 % soit lorsque la valeur lorsque la valeur de l'entreprise ou la valeur nominale des titres comprise dans la part taxable de chaque héritier, donataire ou légataire est supérieure à 10 % de la valeur de l'entreprise ou du capital social, soit lorsque, globalement, plus du tiers du capital social est transmis.

10/ Quel est le délai de reprise de l'Administration ?

L'Administration dispose d'une faculté de réparer les omissions ou les insuffisances d'imposition pendant un délai de 3 ans lorsque les déclarations ont été effectuées normalement. Le délai est porté à 6 ans lorsque l'exigibilité des droits n'a pas été suffisamment révélée par un acte enregistré ou par une déclaration (ce qui rend nécessaires des recherches ultérieures).

Bon à savoir

Les héritiers ou légataires d'au moins un tiers de l'actif transmis peuvent demander à l'Administration de procéder, dans les 12 mois de la demande, au contrôle de la déclaration de succession. Ce contrôle préalable permet de raccourcir le délai dans lequel l'Administration est susceptible de procéder à un contrôle de cette déclaration ou cet acte. Seuls les actes et déclarations spontanément présentés à l'enregistrement, et pour lesquels les droits ont été intégralement payés, peuvent valablement faire l'objet d'une demande de contrôle

 

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